Aussi loin que je me souvienne cette période
remontant à l'enfance Lomagnole, c'était celle de la trêve des Confiseurs ou
aucun match n'avait lieu pour Noël supplanté par des bourriches et des lotos
sous la coupe des bénévoles du club. Gastronomiquement parlant, une période
faste pour la ligne d'avants et lourde de conséquences pour les arrières ! Tout
le monde se retrouvait accompagné(e)s des proches pour festoyer jusqu'à pas
d'heures. L'église n'était pas oublié pas plus que la famille. Plus questions
de parler de matchs mais plutôt d’évoquer les souvenirs présents et anciens.
Pour cela, il fallait se rendre au "Café Maupas", lieu culte du
village empestant le tabac, le pastis et la gouaille paysanne ou les mains
calleuses battaient les cartes au son des anecdotes. Côté champs, la terre
reposait en paix, les faisans, les bécasses jouaient à cache cache avec les futiles chasseurs. La Gimone, sous un brouillard matinal, transportait ses eaux
boueuses de méandres en méandres. Au cabinet médical, la salle d’attente
grouillait d’impatience tout en racontant en patois les petits potins de
voisinage. Le marché du samedi était l’occasion de faire les dernières
emplettes pour le Réveillon pendant qu’au Foirail, le concours de foies gras,
chapons et pintades récompensait les meilleurs lots. Faut dire que mon Père était
gâté recevant en offrandes de Noël les premiers prix du concours issus de sa
patientèle. Vous dire que les repas n’étaient pas copieux et riches serait un
pieu mensonge, notre « Bonne » Madame Maillol, un vrai cordon bleu,
exécutait des recettes savoureuses sur le
vieux piano en fonte nourri au feu de bois. Ma Mère s’occupait de la décoration
de la table faute de pouvoir œuvrer en cuisine, domaine réservé à qui de droit. Mon Père, caviste par passion, choisissait des bouteilles en ma compagnie, m’expliquant la provenance avant l’avis
tranché de l’œnologue familial. Tout une effervescence avec ses rites et coutumes, un
espace temps ayant laissé la place aux rêves, aux discussions interminables au son
de la flambée de bois et des vapeurs croisées du tabac et des cigares. Vous
comprendrez aisément le pourquoi du comment de mes goûts prononcés pour les
produits de la terre et mon affection ancrée pour le rugby. Je regardais le
Stade hier soir, bousculé par les marins de la Rade qui ont fini par couler le
tout dans un écrin de paillettes et d'artifices alors même qu’à côté du
Stadium sont les boutiques des Restos du Cœur et celles du Secours Catholique.
Je suis ravi de vous conter ce moment de vie d'un petit enfant privilégié et heureux qui a
vécu dans le berceau de Pierre de Fermat perdu dans la Lomagne agricole et
rugbystique et, en l’écrivant, je me rends compte que le Bonheur n'est qu’une
illusion fugitive et que le rugby est devenu un marqueur de la société de
consommation avec ses illusions et ses nouveaux critères. Alors Joyeux Noël, à Toutes et à Tous, ovale, goûteux et familial.