23 novembre 2024

 Noir où Bleu



Noël est arrivé en avance cette année pour sublimer ce moment intemporel et unique qu'est France All Blacks. Oui j'y étais, juste au dessus de la cabanne des Blacks avec Sir John Kirwan à mes côtés. Moment solennel d'une vie ou 25 ans d'espoir, de patience et de travail s'oublie devant une telle féérie. Oui, tel un dieu, le stade de France s'est métamorphosé en mythique Dyonisos, de par son enceinte et non parcequ'il est le dieu du Vin et de l'Ivresse. Noir et Bleu, par un éclairage féérique en mode clair obscur sur la pelouse, a mis en lumière le Haka dans un silence digne des dominicains. Dame Lune n'avait plus qu'à donner l'étincelle attendue pour que rayonne le spectacle de mille feux. Saveur ultime que d'écouter Kirwan et les remplaçants assis au dessus de moi reprendre le Kapa O Pango en coeur. Mieux encore tous les remplaçants et blessés se sont arrétes devant ce monument vivant qu'est Sir Kirwan, le saluant avec respect et, à chacun d'entre eux sans exception, il aura un petit mot. Cette simplicité, ce sourire naturel derrière des lunettes de rock star, cette élégance, m'a fasciné montrant a quel point les racines sont là, bien ancrées et belles à déguster. La soirée prenait donc une autre dimension, inattendue, inoubliable, à côté de cette icone du rugby me rappelant ce souvenir de 2006, sur les toits de Gerland ou je découvrais Johna Lomu dans un match à sens unique. Plaise à dire que de l'autre côté  du tunnel des gladiateurs siégeait l'establishment français, morose, sans saveur, ni odeur. Le contraste était frappant digne d'une série noire ou l'on sentait qu'une défaite serait synonyme du son du glas pour certaines têtes. Le pire, que personne ne voit, c'est d'observer tous ces courtisans de la fédération, imbus de leurs responsabilités d'un soir, oeuvrés pour une symphonie en sol mineur. Pire, le bonnet rouge digne du commandant Cousteau, était dans le viseur des caméras de la "Komandatur" nécessitant de montrer mon accréditation et de le retirer par transparence ! Quid du match. Sans surprise, dominé par les "Noirs" dans tous les compartiments de jeu avec un passage à vide en début de 2e mi-temps qui leurs coûtent la victoire. Se faire un croque en jambe à la 60e et 70e en ne donnant pas des ballons d'essais a fustigé la colère de mon voisin, John, ecoueré d'un tel individualisme qui résonne faux dans les gènes de la "Fougère argentée". A sa décharge, faute de produire du jeu, la défense "Bleu" fût héroique de bout en bout avec assez peu de fautes au final. John, avec humour, me serra la main pour cette victoire et son contact me donna encore plus le goût et la saveur d'aller aux antipodes pour partager la culture de l'ovale argenté. La victoire, comme si c'était "la libération de Paris", laissa place à l'euphorie sur le parterre des officiels dans lequel je me suis infiltré pour serrer la main de quelques personnalités dont le 1er Ministre et le Président Grill qui félicitaient Fabien Galthié tout sourire et dilétante. "Panem et circenses" pour cette tournée d'automne, tant pour l'équipe de France que pour le public, illuminés par le jeu des couleurs et par la musique énivrante. Du "Noir" de la coupe du Monde, nous sommes passés au "Bleu" de l'inutile tellement l'enjeu est futile, grotesque et sans lendemain. Une fois de plus, notre hilarité de gaulois nous perdra dans la cascade des matchs amicaux, révélatrice plus de nos faiblesses que de nos forces. Si Bachelard disait que "le noir est le refuge de la couleur", je retiendrais ceci “entre les croquis et la toile, la couleur fait foi de tout, la couleur crée l'émotion et laisse jaillir l'étincelle de la création" (Norman Reid). Le Noir fût le symbole de ma soirée après 25 ans de couleurs diverses et variées.

11 novembre 2024

 Le 11 Novembre


Le challenge FOCH - RONARC'H (2013) est un match commémoratif de rugby organisé le 11 novembre en mémoire des anciens, entre le rugby club de l'armée de Terre (RCAT) et le rugby club de la Marine Nationale (RCMN). Il fut le terreau de l'équipe de France, Championne du Monde Militaire en 2023 à Vannes en battant les Fidji ! Dusautoir, parrain du challenge, dit "dans le rugby nous partageons beaucoup de valeurs avec l’armée : goût de l’effort, esprit d’équipe, esprit de corps, dépassement de soi". Ce qu'il faut savoir, c'est qu'à Twickenham, l'armée de Terre est opposée à celle de la Marine devant 60 000 personnes pour la même cause. Les All Blacks, à chaque visite en France, vont se recueillir sur les tombes de leurs aïeux pour que le souvenir ne soit pas qu'une date de l'histoire. Mais l'impensable est là aussi, le 24 octobre 1918, le Figaro annonce la tenue d'un match de rugby entre l'équipe nationale de l'Armée Française et la Nouvelle-Zélande au profit de la Maison des journalistes ! A peine pensable aujourd'hui quand on connait le nombre de morts. Il est une évidence que même à l'époque, il existait un décalage entre la réalité et la fiction. Si le 02 novembre est le jour des Défunts, le 11 Novembre est le symbole d'une paix chèrement payée pour une guerre stérile à tous points de vue.

Que retient le rugby de ces années noires ou les fantassins bleu cocarde allaient au front la fleur au fusil pour une guerre éclair ? A vrai dire, pas grand-chose quand on sait que pour le week end de Toussaint, deux joueurs de l'US Dax (Pro D2) ont été mis en garde à vue pour "agressions sexuelles" et "violences sous alcool". Dusautoir a bonne mine tout autant que le rugby français entré dans une période de puritanisme qui me fait penser au catharisme puisque nous sommes en Occitanie. Le prêchi prêcha du président Grill est d'un formalisme illogique et à contre-courant de la société actuelle. Comme si lui ne buvait pas à l'occasion ! Depuis longtemps, Bacchus est synonyme de plaisirs libertins et la médecine paie une lourde contribution avec les bizutages, les addictions et les viols. L'ovale n'échappe pas à la règle sociétale actuelle tout comme le football avec les frasques de certains joueurs et tous les non-dits dont on ne sait rien.

L'année 2024 est à marquer au fer rouge avec les dérapages verbaux, l'alcoolisme, les addictions et les violences sexuelles et familiales. Pire, in memoriam, 2 jeunes espoirs des EDF ont perdu la vie face à la bétise humaine ou pire l'incompétence professionnelle et le seul refuge à ces peines n'est que la justice. Le bouquet final pour ce jour de recueil, si je puis me permettre, c'est le carton rouge que j'adresse au public rochelais pour avoir ovationné Jégou pour fêter son retour sur le terrain et pour son essai. Du dégout à l'état brut, rien de plus. Le devoir de mémoire ne dure pas cinq minutes comme sur les réseaux sociaux mais des décennies voir des siècles maintenant et le rugby ne doit pas se soustraire à ces traditions !